Amendes records contre les 4 émetteurs historiques de titres restaurants

L’Autorité de la concurrence a annoncé le 18 décembre avoir infligé des sanctions d’un montant cumulé de près de 415 millions d’euros aux quatre émetteurs de titres-restaurant historiques en France : Edenred France, Up, Natixis Intertitres et Sodexo Pass France ainsi qu’à la Centrale de Règlement des Titres (CRT), qui assure, pour leur compte, le traitement et leur remboursement auprès de leurs clients.

L'Autorité de la concurrence a annoncé le 18 décembre avoir infligé des sanctions d'un montant cumulé de près de 415 millions d'euros aux quatre émetteurs de titres-restaurant historiques en France : Edenred France, Up, Natixis Intertitres et Sodexo Pass France ainsi qu’à la Centrale de Règlement des Titres (CRT), qui assure, pour leur compte, le traitement et leur remboursement auprès de leurs clients.

Leader du marché, Edenred écope pour sa part de l'amende la plus lourde : 157,09 millions d'euros. Les 4 émetteurs historiques détenaient quasiment 100 % du marché des titres restaurants (titres papiers et matérialisés confondus au moment où les faits leur étaient reprochés.

L’Autorité a estimé que ces acteurs « ont méconnu le droit de la concurrence en mettant en place des pratiques constitutives d’entente » . Ces entreprises ont été épinglées pour une entente portant sur des « échanges d’informations  » – elles se communiquaient leurs parts de marché mensuelles respectives – et un « verrouillage » du marché des titres restaurant, qui a freiné la dématérialisation de ces derniers, que ces entreprises voulaient retarder.

Edenred, émetteur de Tickets Restaurant, a été le plus lourdement sanctionné avec une amende de 157 millions d’euros, suivi par Sodexo, qui écope de 126 millions d’euros d’amende, puis Natixis Intertitres, avec 83 millions, la société Up, 45 millions d’euros, et enfin la CRT, pour 3 millions d’euros.

C’est la troisième sanction la plus élevée prononcée depuis dix ans, derrière celles infligées au secteur des produits d’entretien (951,2 millions) en 2014 et des messageries (672,3 millions) en 2015.

Deux types de pratiques ont été mises en œuvre, détaille l’Autorité. Entre 2010 et 2015, Edenred France, Up, Natixis Intertitres et Sodexo Pass France ont échangé chaque mois, par le biais de la CRT, des informations commerciales confidentielles portant sur leurs parts de marché respectives, ce qui a permis de restreindre la concurrence entre eux, commente l’Autorité.

Par ailleurs, entre 2002 et 2018, Edenred France, Up, Natixis Intertitres et Sodexo Pass France ont adopté « une série d’accords ayant pour objet de verrouiller le marché des titres-restaurant en contrôlant l’entrée de nouveaux acteurs et en s’interdisant réciproquement de se lancer dans l’émission des titres dématérialisés (sous forme de carte ou d’application mobile). Ces pratiques ont porté atteinte à la concurrence et freiné le développement en France de l’innovation technologique, avec les titres-restaurant dématérialisés. »

Ces montants très élevés s’expliquent, a indiqué l’Autorité, par le fait que trois de ces quatre entreprises (Accor, propriétaire à l’époque des activités d’Edenred, Sodexo et Chéque Déjeuner rebaptisé depuis Up), avaient déjà été condamnées en juillet 2001 pour « des ententes anticoncurrentielles de répartition de marché et de prix ». Condamnation sanctionnée d’une amende de 8,5 millions de francs, qui n’avait pas fait l’objet de recours de leur part.

Or ces entreprises se sont livrées à de nouvelles infractions « moins de sept mois après » ces premières sanctions, ce qui a alourdi de 30% les montants des amendes , a précisé la présidente de l’Autorité, Isabelle de Silva,, lors d’une conférence de presse.

Les quatre émetteurs ont déclaré qu’ils allaient engager une procédure d’appel. Ce qui n’avait pas été le cas en 2001.Les amendes restent toutefois immédiatement exigibles, leur recours n’étant pas suspensif.

La Cour d’appel de Paris instruira le recours. Dans la très grande majorité des dossiers qu’elle a traités depuis 2014 (100 % en 2017 et 2016, 87 % en 2015, 94 % en 2014), la Cour a confirmé la décision de l’Autorité, en ayant réduit dans quelques cas et de façon marginale, le montant des amendes.

Dans l’hypothèse où les émetteurs considéraient n’avoir pas obtenu gain de cause auprès de la Cour d’appel, ils pouvaient saisir alors la Cour de cassation. Autant dire qu’un feuilleton judiciaire de plusieurs années s’engagerait.

Les quatre émetteurs vont faire appel

Le 18 octobre, le groupe Edenred a affirmé « réfute(r) catégoriquement les deux griefs reprochés« , et indiqué vouloir « faire appel » de cette décision. Le groupe n’a pas provisionné pour régler cette amende, a précisé une porte-parole à l’AFP. Le montant est « immédiatement exigible« , selon l’Autorité.
De même, Natixis a affirmé son intention de faire appel et s’est dite « extrêmement surprise de cette décision qui lui semble dépourvue de fondement et totalement disproportionnée« .
Sodexo indique aussi « contester avec la plus grande fermeté » la décision « qui témoigne d’une appréciation totalement erronée des pratiques en cause et du fonctionnement du marché« , et va faire appel.
Quant à Up, qui fera aussi appel, il « réfute les accusations d’échanges d’informations anticoncurrentiels et de verrouillage de marché« , estimant que l’Autorité « n’a pas correctement apprécié la dynamique concurrentielle du secteur des titres-restaurant« . (dépêche AFP).

Le communiqué de presse détaillant la décision de l’Autorité de la concurrence


Ce secteur représente plus de 6 milliards d’euros par an, soit 700 000 titres restaurants que quelque 4 millions de salariés d’entreprises utilisent auprès de 200 000 restaurants ou boulangeries agréés.
L’Autorité de la concurrence avait été saisie en 2016 de pratiques anticoncurrentielles dans le secteur des titres-restaurant par la société Octoplus (Resto Flash), qui propose une application mobile pour le paiement des repas, et par trois organisations professionnelles : le Syndicat National de la Restauration Thématique (SNRTC), le Syndicat National de la Restauration Publique Organisée (SNRPO) et la Confédération des Professionnels Indépendants de l’Hôtellerie (CPIH, devenue UMIH).

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

A lire dans la même rubrique

Leader du marché, Edenred écope pour sa part de l'amende la plus lourde : 157,09 millions d'euros. Les 4 émetteurs historiques détenaient quasiment 100 % du marché des titres restaurants (titres papiers et matérialisés confondus au moment où les faits leur étaient reprochés.