Le restaurateur parisien a conclu un accord transactionnel avec la compagnie d'assurances qu'il avait fait condamner en première instance le 22 mai par le Tribunal de Commerce de Paris. Les deux parties n'ont pas communiqué ses modalités financières. Mais Axa couvrira bien une partie des pertes d'exploitation de ses quatre restaurants. L'assureur serait en voie d'indemniser 600 autres restaurateurs.
Sauf nouveau coup de théâtre, l’affaire Manigold-Axa devrait finalement s’en arrêter là. Et leur procédure judiciaire s’achever beaucoup plus tôt que prévu. Mardi 23 juin, en effet, le restaurateur et homme d’affaires a annoncé avoir « finalisé des discussions constructives et trouvé un accord» avec Axa. « Un accord a été trouvé avant l’appel. Toute la procédure se termine donc suite à cette négociation », indiquait de son côté la compagnie d’assurances.
L’assureur a donc accepté d’indemniser une partie des pertes d’activité de ses quatre établissements parisiens. Celles du Bistrot d’à côté Flaubert, pour lequel Manigold, le 22 mai, avait obtenu du Tribunal de commerce de Paris le versement de 45 000 euros, à titre de provision. Et de 5000 euros au titre du code de procédure civile. Mais également celles de La Maison Rostang, du Substance et du Contraste. Perte provoquée par leur fermeture le 14 mars. Fermeture que l’Etat avait ordonnée pour tous les établissements de restauration. Dans le cadre, on s’en souvient, des mesures sanitaires prises pour lutter contre la pandémie Covid-19. Axa avait décidé de faire appel.
Indiscrétion ou spéculation sur le montant de l’indemnisation ?
Les deux parties n’ont pas communiqué les termes financiers de cet accord. Mais selon le magazine Le Point, Axa aurait d’abord proposé, tout comme à ses confrères disposant du même contrat, 24 % de son chiffre d’affaires hors taxe sur quatre mois – équivalent un peu moins d’un mois au total pour ses quatre restaurants. Soit, selon les calculs de l’hebdomadaire, près de 450 000 euros.
Stéphane Manigold aurait refusé cette modalité, toujours d’après le Point. Préférant s’en tenir à la règle à priori plus avantageuse retenue par le tribunal de commerce. A savoir une indemnisation basée sur l’équivalent de la marge brute pendant deux mois et demi. Toujours selon les calculs du média, l’homme d’affaires pouvait ainsi prétendre à près de 700 000 euros. Sachant que le CA de ses quatre restaurants s’élevait à environ 5,5 millions d’euros hors taxes.
Nous ne saurons sans doute jamais le fin mot de la transaction. « J’ai estimé leur offre suffisante parce qu’on a rouvert au bout de trois mois », a indiqué Stéphane Manigold à l’AFP. « Elle n’est pas à la hauteur de ce que j’attendais, soyons clairs », a-t-il nuancé. « Mais maintenant que le déconfinement est là, il faut s’occuper de nos clients ». Il n’a pas indiqué non plus s’il comptait toujours rembourser à l’Etat l’indemnisation du chômage partiel de ses salariés. Remboursement auquel il s’était engagé.
Près de 1 700 restaurateurs potentiellement indemnisables par Axa
L’affaire Manigold-Axa semble toucher à sa fin. Pour autant, l’assureur n’en aura pas fini avec l’indemnisation d’autres restaurateurs. « Je me réjouis qu’Axa ait entendu mon appel à engager le dialogue et à proposer une solution à l’ensemble des restaurateurs qui détenaient les mêmes contrats que les miens », se félicite Stéphane Manigold.
Manigold ou pas, la compagnie n’aurait pu faire autrement que d’en indemniser au moins une partie. Selon son directeur général, Thomas Buberl (26 mai au micro de RTL), moins de 10 % des restaurateurs ont souscrit un contrat similaire. Environ 1 500 à 1 700 contiendraient une garantie contractuelle couvrant l’indemnisation au titre des pertes d’exploitation. Avec toutefois des différences d’interprétation possible, selon l’assureur.
« A ce jour, nous avons d’ores et déjà conclu des accords avec près de 600 de ses assurés », précise-t-on chez Axa. Qui ajoute que des discussions se poursuivent avec d’autres restaurateurs.
Les tribunaux de commerce de Lyon et Bordeaux rejettent deux demandes et les renvoient sur le fond
Axa n’en a pas non plus terminé sur le front judiciaire. Ainsi à Bordeaux, le tribunal de commerce était saisi en référé par Christian Durocher, le propriétaire de « Chez Aldo », un restaurant saisonnier du Bassin d’Arcachon. Le 23 juin, le juge des référés s’était déclare incompétent sur sa demande de provision au titre des pertes d’exploitation. Le Tribunal l’a donc débouté de sa demande de provision, estimée à 30 000 euros et de sa demande de condamnation d’AXA au titre du préjudice moral. Il « invite » le plaignant à saisir le juge sur le fond.
Le juge de Bordeaux a également ordonné une expertise pour évaluer le montant des pertes d’exploitation subies en ne réouvrant pas au 1er avril. Evaluation qui ne présume pas de sa décision définitive. L’expert désigné rendra son rapport d’ici six mois.
En parallèle, le 1 er juillet, le tribunal de commerce de Lyon devrait statuer sur la plainte opposant Axa à un couple de restaurateurs du Beaujolais, David Genillon et Valérie Nassi. Ce couple tient depuis 2013 le restaurant Le Bacchus, dans le village de Lancié. Le 10 juin, le juge des référés du Tribunal avait rejeté leurs demandes, se déclarant incompétent. Il renvoyait l’affaire à une audience sur le fond le 1er juillet.
Axa avait refusé d’indemniser les pertes d’exploitation du Bacchus, estimées à 17 000 euros. Selon l’assureur, une clause d’exclusion figurant au contrat interdirait cette indemnisation, l’épidémie ayant frappé également d’autres établissements. Pour l’avocat des plaignants, cette clause d’exclusion serait, au contraire, « abusive, un tour de passe-passe contractuel car l’épidémie est expressément garantie ».
Le communiqué de presse de Stéphane Manigold publié sur son site Linkedin le 23 juin
«Je suis heureux d’avoir finalisé aujourd’hui des discussions constructives avec Axa et trouvé un accord dans le cadre du différend qui m’opposait à la compagnie d’assurances.
Je me réjouis qu’Axa ait entendu mon appel à engager le dialogue. Et proposer une solution à l’ensemble des restaurateurs qui détenaient les mêmes contrats que les miens. Et je remercie mon courtier Satec pour son accompagnement tout au long de la période.
Après ce combat déterminé, une page se tourne enfin pour moi pour en ouvrir une autre. Celle de retrouver mes équipes, mes clients, les vignerons, et tous les artisans de la terre et de la mer. Afin de développer ensemble l’activité de mes restaurants dans le contexte que tout le monde connaît. »