Fermé depuis mars 2020 en raison de la crise sanitaire, cet hôtel 5 étoiles parisien en a profité pour engager des travaux de rénovation énergétique. Il vient de procéder au calorifugeage de son réseau de chauffage et d'eau chaude sanitaire, en visant une économie de charges de 15 %. Le San Regis a financé cette opération grâce aux Certificats d'Economies d'Energies (CEE). Le délégataire GEO PLC Hellio et l'entreprise de travaux d'isolation ERTI l'ont accompagné dans cette démarche.
De toutes les formules de subvention et défiscalisation des investissements en rénovation énergétique, le dispositif des Certificats d’Economie d’Energie (CEE) n ‘est pas le plus connu. Et pourtant, son marché devrait peser plus de 4 milliards d’euros en 2021 selon une récente étude de Pwc Strategy&.
Il est vrai que ce mécanisme est l’un des plus avantageux pour ses bénéficiaires, particuliers et entreprises. Au point de provoquer des fraudes de la part d’entreprises prestataires (lire à ce sujet l’article édifiant de l‘Usine nouvelle). Le rendement énergétique réel des CEE est également questionné. L’Ademe a lancé en 2019 « un bilan approfondi factuel du dispositif », de manière à « confronter les économies constatées sur le terrain avec les volumes de CEE générés. »
Rappelons le principe des CEE. La loi POPE de 2005 fait obligation aux fournisseurs d’énergie (électricité, gaz, fuel, etc.), appelés les « obligés » (du producteur Total au distributeur Leclerc…), de réaliser chaque année des économies d’énergie d’environ 1,5 %. Comment ? En incitant leurs clients utilisateurs d’énergie, particuliers ou professionnels, appelés les « non obligés », à réaliser des travaux d’efficacité énergétique. Travaux que ces « obligés » vont financer en rachetant à ces clients des Certificats d’Economie d’Energie (CEE) correspondant aux volumes d’énergie économisés.
Le prix moyen des CEE n’a cessé d’augmenter
La valeur de ces CEE est basée sur un prix exprimé en c€/kWh cumac (centimes d’euro par kilowatt-heure cumulé actualisé). Prix qui varie en fonction des transactions entre offreurs et demandeurs. Et qui ne cesse d’augmenter, comme on le constate sur le registre national Emmy des CEE. En novembre 2014, le prix moyen pondéré d’un CEE atteignait 0,334 centime d’ euros pour un volume total de transactions de 8 857 GWh Cumac. En novembre 2020, il atteint 0,835 centime d’euros pour un volume de 16 289 GWh Cumac. (1 GWh équivaut à 1 million de kWh, soit 3,6 TJ (Térajoule).
Troisième maillon clef du dispositif, des entreprises tiers mandataires peuvent réaliser des actions éligibles à la collecte de CEE. Parmi eux, des délégataires officiels (sur lequel est déléguée l’obligation d’un obligé). La direction de l’hôtel San Regis a choisi à ce titre la société GEO PLC Hellio, spécialiste de l’efficacité énergétique et du financement par CEE. Hellio avait pour partenaire technique l’entreprise de travaux d’isolation ERTI.
Calorifugeage et isolation des points singuliers
Les CEE émis ont donc subventionné le programme d’isolation du réseau d’eau chaude du San Regis. Il aurait du lui coûter plus de 11 000 euros. Mais selon Hellio, l’hôtel, finalement, n’aurait rien déboursé.
Le calorifugeage consiste à isoler thermiquement les tuyaux d’eau chaude, avec un isolant « calorifuge ». Au San Regis, il portait exclusivement sur le réseau de chauffage collectif et d’eau chaude sanitaire situé dans les parties communes et les caves non chauffées.
En complément, ERTI a également isolé les points singuliers. En posant des matelas amovibles de laine minérale revêtus d’un tissu technique sur les parties non calorifugées en chaufferie et sous-station. A savoir les vannes, les robinets, les réducteurs et les compteurs.
Ces travaux n’ont duré que 4 jours. En incluant une phase de dépose de l’ancien isolant et l’évacuation des gravats. Puis la mise en place des coquilles isolantes et l’habillage en PVC. Et enfin la pose des matelas isolants, démontables en chaufferie pour faciliter la maintenance.
Outre une baisse du coût chauffage, l’ intervention permettra d’offrir davantage de confort. La clientèle disposera d’une eau chaude instantanément et à température constante.
Les CEE peuvent financer une trentaine d’opérations différentes
GEO PLC Hellio n’est pas le seul délégataire à intervenir dans le secteur tertiaire. Citons également, entre autres, Eqinov, intervenu auprès du JW Marriot de Cannes (261 chambres) pour la rénovation de son système de climatisation. « L’établissement a acquis un équipement garantissant la production de froid et la récupération de chaleur pour un besoin d’eau chaude sanitaire et de chauffage. Un investissement couvert à 80 % avec un temps de retour sur investissement quasi immédiat », explique son directeur technique Lamine Arouf.
Hellio se prévaut néanmoins d’avoir réalisé en 12 ans 277 opérations de rénovation énergétique dans les hébergements touristiques. Dont 125 dans les hôtels. L’enveloppe globale de CEE versés dépasserait les 17 millions d’euros pour 30 types d’opérations différentes. Isolation, chauffage, éclairage, systèmes hydro économes…
Zeina Georges, directrice générale adjointe de l’hôtel San Regis
« Cela fait quelques années que nous avons la volonté d’entreprendre des changements pour améliorer notre impact environnemental et avoir une démarche plus responsable.
Nous avons commencé par réduire nos coûts de fonctionnement en travaillant sur l’éclairage. Nous avons ensuite travaillé sur le traitement des déchets alimentaires et le tri des autres déchets.
La fermeture de l’hôtel pendant la crise sanitaire nous a semblé être une belle opportunité pour entreprendre des travaux plus lourds qui auraient pu avoir un impact sur le confort de nos clients.
Notre objectif à terme est triple : améliorer notre impact environnemental, réduire nos coûts d’exploitation et offrir clarté et transparence à nos clients par l’obtention d’un label ou même d’une étiquette environnementale.»
De l’importance d’isoler aussi les points singuliers !
« Les points singuliers (1) sont rarement isolés dans une chaufferie, explique Alexis Delacommune directeur opérationnel d’ERTI. Le plus souvent, le calorifuge s’arrête en amont et en aval du point à isoler. Le fait de calorifuger les réseaux de chauffage et d’isoler les points singuliers permet de limiter les pertes thermiques . Cela génère un gain énergétique d’environ 15%, se traduisant par une baisse de charges pour l’hôtel. Il y a aussi un avantage d’ordre esthétique : le calorifuge vieillissant (de classe 2 ou inférieur) est remplacé par un calorifuge neuf (classe 4) avec un habillage en PVC .»
(1) les points singuliers permettent de faire la jonction entre deux segments de tuyauterie. L’Ademe et l’Atee recommandent d’isoler aussi ces points sensibles, car ils sont sources de déperdition de chaleur.
Trois vues de l’hôtel San Regis
L’hôtel San Regis est situé au 12 rue Jean Goujon, dans le 8 ème arrondissement de Paris, à deux pas du rond-point des Champs-Elysées et du Palais de la Découverte. Ce très bel établissement classique est dirigé par Sarah et Zeina Georges, les filles d’Elie Georges, propriétaire depuis 1984. Le San Regis compte 30 chambres et 12 suites, ainsi qu’un restaurant gastronomique, Les Confidences. Il espère rouvrir ses portes en février 2017.
Son perron d’entrée
La verrière de son restaurant Les Confidences
Une junior suite
Photos : Fabrice Rambert
La liste des délégataires agréés pour la gestion
des certificats d’économie énergie
Pour obtenir un financement par CEE, le recours à un délégataire d’un « obligé » (le fournisseur d’énergie soumis à une obligation) n’est pas obligatoire. L’entreprise ou la collectivité éligible aux CEE peut aussi contracter des CEE via des courtiers (Place des Energies…). Ou encore des plateformes dédiées des obligés (regroupements d’artisans, magasins de bricolage…). Ou encore des banques financeurs. On recommandera, par conséquent, de faire jouer la concurrence entre ces intermédiaires. En comparant, par exemple, les primes d’énergie offertes et les compétences-références des entreprises prestataires.
Liste des délégataires P4 au 2020-04-02