Réunis à Paris le vendredi 13 novembre, de gauche à droite Alessandro Nucara, Directeur général de Federalberghi (Italie) – Jean-Marc Banquet d’Orx, trésorier général de l’UMIH et président de la commission sociale de l’HOTREC (France) – Laurent Duc, président de la branche hôtellerie de l’UMIH (France) –Jane Seymour, conseillère juridique du British Hospitality Association (Royaume Uni) – Jacques Barré, président du GNC (France) – Markus Luthe, directeur général de IHA (German Hotels Association), membre de l’Excom de l’Hotres – Didac Garcia Carreté, directeur de CEHAT (Confederacion Española de Hoteles y Alojamientos Turisticos)
La charte de l’Hotrec pour une économie collaborative durable et partagé
Ces propositions visent à restaurer l’équité et à protéger le consommateur et se déclinent de la façon suivante
- Intégrer les locations de courte durée des particuliers dans la réglementation des hébergements touristiques
- Mettre en place une procédure d’enregistrement et de permis
- Faire des études statistiques des locations de courte durée
- Appliquer les exigences de sécurité et les contrôler dans la protection du consommateur
- Respecter la réglementation fiscale
- Vérifier l’identité des visiteurs conformément aux obligations de l’accord de Schengen
- Protéger les droits et avantages des salariés
- Protéger la qualité de vie du voisinage
- Clarifier et assurer des distinctions claires entre l’usage d’habitation et l’usage commercial
- Contrôler l’expansion des locations de courte durée
La charte Hotrec
Ce n’est que notre analyse (mais on la partage !)
Schumpeter ne répond plus !
Il est rassurant d’entendre les patrons des fédérations hôtelières jurer leur grand dieu qu’ils n’ont rien mais alors vraiment rien contre l’économie « collaborative ». Surtout s’ils sont sincères….
Car si d’aventure, leur combat consistait à faire interdire cette activité nouvelle, ledit combat serait perdu d’avance, y compris pour leur image de marque. Quels avantages les professionnels de l’hospitalité retireraient-ils de passer aux yeux des consommateurs pour le vilain méchant de l’histoire qui veut empêcher les particuliers de louer de temps à autre leur résidence à des hôtes de passage ?
Nous l’avions écrit, nous le redisons ici, une nouvelle offre est apparue entre 2008 (création d’Airbnb) et 2011 (son arrivée en France). Elle s’est depuis développée à une vitesse grand V, s’industrialisant en partie (des foncières masquées sous des prénoms d’emprunt ont fait leur apparition, gérant en réalité des parcs d’appartement), convertissant des millions de consommateurs dans le monde, des centaines de milliers en France. Le train est en marche, rien ne pourra l’arrêter. Du moins aussi longtemps que cette marche, ou plutôt cette vive allure, sera soutenue par une symétrie offre-demande suffisante et rentable.
On n’en concluera pas pour autant que le phénomène Airbnb relève de « l’innovation destructrice » conceptualisée par l’Autrichien Joseph Schumpeter. Une théorie pourtant fort solide, souvent avancée pour alerter l’opinion sur les effets pervers de la numérisation de l’Economie.
La location entre particuliers ne détruira pas les autres formes d’hébergement de courte ou de moyenne durée. Elle s’ajoutera à elles en leur prenant sans doute au passage quelques parts de marché. Mais elle contribuera aussi et surtout à diversifier et à étoffer l’offre d’hébergement dont la France a besoin pour être en mesure d’accueillir les 100 millions de visiteurs ambitionnés pour 2020.
L’ampleur de cette redistribution du marché, qui est déjà en cours, sera fonction de deux conditions. De l’encadrement de cette activité nouvelle d’une part. De la capacité d’adaptation et d’innovation des acteurs historiques (hôtels, campings, résidences…) d’autre part.
Encadrer cette activité par des obligations réglementaires ? L’entière responsabilité en revient aux pouvoirs publics, du sommet de l’Etat à la plus modeste collectivité locale, et aux fédérations professionnelles. Mais ne nous illusionnons pas, le dialogue sera plus rude cette fois que lors de l’abrogation de la clause de parité tarifaire des OTA. Car Emmanuel Macron, dans sa future loi NOE, veut à nouveau libérer l’économie et stimuler le pouvoir d’achat des classes moyennes, il n’est pas sûr qu’il légifère aussi loin que les fédérations le souhaiteraient, en imposant à des appartements privés des normes conçues pour des Etablissements Recevant du Public. Et n’en doutons pas, les Patronales trouveront face à elles Airbnb et consors et leurs lobbyistes jamais à court d’arguments.
S’adapter, innover ? L’entière responsabilité en revient aux opérateurs privés, personne ne leur tiendra la main. C’est à eux et à eux seuls (avec des concours financiers adaptés) qu’il appartient de réenchanter, de réinventer l’hôtel de demain, de restaurer sa compétitivité et son attractivité. Et de le rajeunir ! La pyramide des âges ne cesse de vieillir dans l’hôtellerie. 65 % des clients de Novotel et Mercure ont plus de 50 ans, quand 70 % des hôtes de Mama Shelter en ont moins de 40 (chiffres déclarés par Sébastien Bazin, le patron d’Accor Hotels).
La décoration la plus raffinée, les équipements les plus hi-tech suffiront-ils encore demain à faire avaler la pilule prix d’une chambre exigüe dans un hôtel dortoir, dépourvu d’espace de rencontres, de bar-lounge, de conciergerie dignes de ce nom. En quête d’une chambre, et plus largement, d’une expérience de séjour agréable, les clients benchmarkent les offres, comparent en permanence, smartphone à la main. Et finissent par opter pour la mieux ou la moins disante en fonction de leurs attentes et de leurs contraintes : « Je voudrai séjourner dans votre hôtel avec mon épouse et mes deux jeunes enfants, pouvez-vous me proposer deux chambres communicantes ou une suite familiale adaptée ? ».
Les rentes de situation sont en train de disparaître dans nombre d’activités, dont l’hébergement touristique. La loi ne protègera pas l’hôtellerie d’un nouveau concurrent qui, lui aussi, atteindra tôt ou tard, ses limites. Sur un marché porteur (le tourisme mondial en croissance), la compétition sera donc plus que jamais ouverte entre compétiteurs. Encore faut-il qu’ils s’affrontent sur un pied d’égalité.
Mais n’en doutons pas, certains vont perdre la compétition. Mais ils seront plusieurs à la gagner, le marché étant considérable et en croissance. Car aucun d’entre eux aujourd’hui n’est en mesure de satisfaire les différentes typologies de clientèles et leurs différents besoins d’hébergement. Aucun mode d’hébergement n’est en mesure de satisfaire la pluralité des besoins et des désirs clients. Fort heureusement !