Avec cette décision du juge des référés, doublée d'une évolution préoccupante de la situation sanitaire, une réouverture de ces établissements avant le 20 janvier semble désormais exclue. L'Umih attend un autre jugement sur le fond pour récuser la légalité des fermetures administratives, mais qui n'interviendra pas avant la fin 2021. L'Umih et le GNI appellent à un rassemblement national à Paris le 14 décembre.
Le juge des référés n’a donc pas suspendu la fermeture des cafés et restaurants. Une décision sans surprise. Elle semblait même probable, au regard de la majorité des décisions récentes prises par les juridictions administratives. Organisations professionnelles et associations ont le plus grand mal à détricoter les confinements et autres restrictions décrétés depuis l’instauration de l’état d’urgence sanitaire.
Dans les rares décisions favorables aux plaignants, celle du 29 novembre a retoqué la jauge prévue dans les églises. Elle a ordonné au Gouvernement de suspendre la limite, absurde, de 30 personnes. Et lui a prié d’instaurer des règles éclairées. L’Etat a du s’exécuter en concertant les autorités catholiques. Ils ont convenu d’une rangée sur deux et de deux sièges inoccupées entre chaque personne.
Autre jugement décisif, pour les professionnels de la montagne cette fois, celui sur les remontées mécaniques des stations de ski. Espéré pour le 9 décembre, il n’est intervenu que le 11. Le juge a voulu intégrer dans son analyse le dernier bilan de l’épidémie, daté du 10. Or celle-ci continue de progresser et met sous pression le système de santé. En particulier dans les régions où se pratiquent les sports d’hiver. Le tribunal a finalement décidé, non sans hésitations, de ne pas suspendre la fermeture des remontées.
Le juge des référés : « Pas de doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée »
Comment le juge des référés a motivé sa décision à l’égard du recours de l’Umih contre la fermeture des CHR ? Celui estime qu’aucun « des moyens» (1) soulevés par les requérants ne fait naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée.
Ainsi, selon le magistrat, la poursuite de l’activité des cantines scolaires, des restaurants d’entreprise et des restaurants routiers n’entraîne pas de rupture d’égalité et de libre concurrence. Le juge estime que l’accès aux cantines se justifie au nom de l’intérêt des enfants de maintenir les écoles ouvertes. Il fait également valoir que les restaurants collectifs ont un objet différent de la restauration traditionnelle. Et une situation différente au regard des nécessités liées à la poursuite de la vie du pays.
Ainsi, l’impossibilité pour tous les salariés de pratiquer le télétravail justifie que ceux qui doivent exercer sur leur lieu de travail puisse accéder à leur cantine d’entreprise. Même raisonnement pour les chauffeurs routiers, autorisés de fait à continuer de fréquenter les restaurants routiers le soir.
Par ailleurs, le Conseil devait statuer sur les griefs de disproportionnalité des mesures de fermeture. Selon le tribunal, aucune preuve n’est apportée que des mesures de type couvre-feu ou réduction de la jauge auraient un effet sanitaire comparable à celui escompté de la fermeture. De même, une approche différenciée des fermetures, territoire par territoire, ne permettrait pas d’enrayer la dynamique actuelle du virus.
Le temps passé et la densité dans les lieux gravés déterminants dans le risque de contanimation
Enfin, le Conseil a récusé l’allégation d’une absence d’études démontrant le risque accru de contamination dans les CHR. Le juge estime que le Gouvernement est fondé à prendre en compte les résultats de l’étude américaine publiée en novembre dans Nature, à partir d’un échantillon de 98 millions de personnes. Cette recherche a pu quantifier les risques d’infection liés aux endroits et aux commerces fréquentés. Des risques significativement plus élevés dans les restaurants, bars, hôtels et salles de sport, que dans les autres lieux de brassage de population, commerces notamment.
Le Conseil fait également état dans son ordonnance d’autres études produites par le ministre des solidarités et de la santé. Etudes qui aboutissent, par des méthodologies différentes, à des conclusions identiques. Le temps passé dans un espace clos et la densité des personnes qui s’y regroupent constituent des paramètres déterminants dans la potentialité du risque de contamination.
« C’est une injustice de plus vécue par notre secteur » , déclare l’Umih
Du côté de l’Umih, on considère que la lecture du délibéré du jugement montre « une injustice de plus à l’égard du secteur».
« Le juge des référés avait demandé à l’Etat à fournir des études françaises sur la contamination en France du Covid-19. De telles données n’ont pas été produites, déplore Roland Héguy, président confédéral de l’UMIH. Et pourtant, le juge des référés a été convaincu de la nécessité du maintien de notre fermeture. Contrairement à nos collègues suisses qui ont obtenu gain de cause dans une démarche similaire ! Avec la date du 20 janvier pour notre réouverture qui s’éloigne c’est un coup de massue supplémentaire pour notre profession qui est de plus en plus désespérée. Je tiens à rappeler que notre profession n’est en rien coupable dans cette crise sanitaire sans précédent. »
Malgré cette défaite judiciaire, les organisations patronales vont accentuer leur mobilisation dans la rue. Une cinquante de manifestations régionales ont eu lieu depuis la rentrée. L’UMIH et le GNI appellent cette fois à un grand rassemblement national et statique à Paris. Il se déroulera esplanade des Invalides, lundi 14 décembre à partir de 13h00.
(1) moyen : terme juridique désignant les arguments