18 mois après le début de la crise sanitaire, le raz-de-marée de liquidations dans les HCR pronostiqué par certains professionnels ne s'est toujours pas produit. Les défaillances, au contraire, n'ont jamais été aussi réduites, selon les données exhaustives d'Altares, provenant des tribunaux et du Bodacc. Pour autant, prévient le spécialiste de l'information financière, la branche n'est pas à l'abri d'un rebond de sinistres en 2022. Tout dépendra de sa capacité à recréer assez de liquidités pour commencer à rembourser sa première annuité de 20 % de PGE.
On pensait que la branche Hébergement Restauration, avec seulement 133 redressements et 444 liquidations d’entreprises prononcées au 2ème trimestre 2021, aurait atteint son plus bas niveau historique. Il n’en a rien été ! Ce plancher a de nouveau reculé au 3 ème trimestre. Altares fait état de 119 redressement et 383 liquidations sur un total de 520 défaillances (vs 593 au 2T 2021).
N’en déplaise aux Cassandre qui se répandaient dans les médias, l’accident industriel de masse qu’ils prophétisaient pour la branche, et la Restauration en particulier, ne s’est toujours pas produit. Des entreprises, c’est inévitable, meurent et disparaissent chaque mois. Mais leur nombre reste limité. Et le solde, avec plus de 39 000 créations en 2020 (dont 20 000 en micro-entreprise), reste très largement positif. Du moins dans la Restauration et les Débits de boissons.
Un vaccin anti-défaillances aux effets limités dans le temps
Et la crise, surtout, n’a pas amplifié les décès. Tout au contraire. L’accompagnement économique et social également juridique (lois d’urgence différant la déclaration de cessation de paiement), mis en place par le Gouvernement à partir d’avril 2020, a a agi comme un vaccin anti-défaillances. Le cocktail fonds de solidarité-chômage partiel-PGE aura évité, sur le court et le moyen terme, la faillite de dizaines de milliers d’entreprise.
La branche Hébergement Restauration, bien que l’une des plus aidées, parce que l’une des plus touchées, n’est pas la seule à avoir bénéficié de ce mur de protection. Ce qui explique le recul des défaillances observé dans la quasi totalité des secteurs. « Avec 5 311 procédures collectives ouvertes, en recul de 20,8 % par rapport au 3e trimestre 2020, le volume des jugements est deux fois inférieur au niveau d’avant Covid » , note Altares.
Et c’est justement dans l’hôtellerie-restauration que la baisse des défaillances est la plus forte (-46,1%) et la plus générale. Dans le détail, le recul est de -29 % pour les hôtels, -43 % pour la restauration à table, -51 % en restauration rapide et -54 % pour les débits de boissons. Contrairement à ce qu’Altares observait au 2ème trimestre, les défaillances baissent également dans les résidences de tourisme et villages vacances (- 33 %) et sont nulles dans les campings.
Est-ce que cette embellie va se poursuivre ? C’est peu probable, selon Altares. « Le dernier trimestre 2021 sera déterminant pour de nombreuses entreprises, augure Thierry Millon, directeur des études du cabinet. Elles devront se donner les moyens d’embrasser la croissance 2022 pour honorer les engagements d’emprunts et rappels de cotisations.»
Le casse-tête du remboursement du PGE
S’agissant des cotisations, les entreprises ont, tout à la fois, bénéficié d’exonérations, de reports de paiement. Et, in fine, de la mansuétude des organismes sociaux. Celle-ci ne saurait durer. Le temps des recouvrements forcés et des assignations reviendra…
Quant aux emprunts, le PGE, au premier chef, devra, c’est une certitude, se rembourser. Plus de 100 000 entreprises de la branche ont contracté ce Prêt Garanti par l’Etat, pour une enveloppe totale de 11 milliards d’euros. Les premières échéances tomberont d’ici le printemps 2022. Pour les honorer, les CHR devront générer, sans aide publique cette fois, une activité plus forte qu’en 2020 et 2021 et plus génératrice de cash flow. D’autant qu’une partie du PGE, comme l’a observé le Conseil d’analyse économique (lire notre article), a servi justement « (…) à éponger des dettes plutôt qu’à financer de l’investissement ou créditer des comptes d’épargne (…)»
Selon Thierry Millon, des entreprises dans l’incapacité de rembourser leurs premières échéances pourraient dès lors envisager de solliciter l’aide d’un tribunal, « pour restructurer le PGE dans le cadre d’une conciliation ou allonger la durée de remboursement avec un plan de sauvegarde ou de redressement.»
Nouveau recul des défaillances,
mais cette fois dans toutes les activités
Sauv. : procédures de sauvegarde
RJ : redressements judiciaires
LJ : liquidations judiciaires
Lecture : Au 3ème trimestre 2021, les défaillances ont diminué de 53,9 % sur le même trimestre 2020. Elles ont baissé de 33 % dans l’Hébergement. De 45,5 % dans la Restauration. Et de 53,6 % dans les Débits de boissons.
Source du tableau : Altares – retraitement HR-infos
Détail des défaillances par secteur, par comparaison trimestrielle
Source du tableau : Altares
Des données réputées fiables et exhaustives provenant des sources judiciaires
Altares comptabilise l’ensemble des entités légales disposant d’un numéro Siren (entreprises individuelles, professions libérales, sociétés, associations). Et l’ensemble de celles ayant fait l’objet d’un jugement d’ouverture de procédure prononcé par un Tribunal de Commerce ou de Grande Instance.
Altares collecte par ailleurs l’ensemble des jugements auprès des greffes des Tribunaux de Commerce ou des Tribunaux d’Instance. L’entreprise est également licenciée officiel du B.O.D.A.C.C.