En France, son âge d'or est désormais derrière elle. La croissance de la restauration collective concédée s'est fortement ralentie depuis 2010, malgré une diversification sur les activités de services. Son taux de marge a baissé de moitié en raison d'une forte pression sur les prix, avivée par les appels d'offres. Les multinationales qui contrôlent encore 70 % du marché cèdent du terrain aux PME de proximité. Le secteur a lui aussi souffert de la pandémie, mais dans de moindres proportions que la restauration commerciale. Résumé de l'étude de l'Insee.
Ce n’est pas encore une crise, mais cela commence à y ressembler. Avant même le choc récessif provoqué par la crise du Covid-19, le secteur de la restauration collective concédée (484 entreprises en France additionnant 11 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2019) connaissait déjà un sérieux coup de mou. Au point de devenir le maillon faible de la Restauration Hors Domicile.
Alors que la production de la RHD, dans son ensemble, progressait de 3,4 % par an entre 2010 et 2019, celle de la Collective Concédée stagnait à +0,6 %. Quelques années auparavant, entre 2005 et 2010, elle atteignait encore +2,5 %.
Trois grandes raisons au moins expliquent cette atonie. En premier lieu, les sociétés de restauration collective ont cessé de prendre des parts de marché à la gestion directe. L’externalisation a longtemps constitué leur premier moteur de croissance. Par ailleurs, leur marché historique des entreprises et administrations connait une érosion, pour des raisons à la fois économiques (baisse des effectifs salariés à restaurer et du ticket moyen) et socio-culturelles (préférence de certains salariés pour le snacking en ville, muni d’un titre restaurant). Enfin, les SRC n’arrivent plus à progresser dans l’Enseignement. Et elles voient ses marges laminées par la guerre des prix. La vague des privatisations parait avoir reflué dans ce secteur, encore largement contrôlé par la gestion directe.
Le salut dans la diversification en facilities management
La Concédée se sauve du naufrage grâce à son développement dans le secteur de la santé et du 3ème âge, en profitant de la création de maisons de retraite et d’Ephad. Et grâce également à ses diversifications. La restauration collective pure ne représente plus que 72 % de son chiffre d’affaires, dont 52 % en préparation de repas et 20 % en gestion de cantine. Ses autres activités de restauration pèsent désormais 12 %, dont 4,1 % en restauration rapide et 3,9 % en service à table. Et surtout, ses activités de services hors restauration atteignent 16 % de ses ventes. Conciergerie, nettoyage, maintenance technique, crèches même…
Le chiffre d’affaires de la restauration collective concédée a baissé jusqu’à 40 % en 2020
Note : données corrigées des variations saisonnières et des jours ouvrables.
Lecture : entre janvier et mai 2020, le chiffre d’affaires de la restauration collective concédée a baissé de 40 %.
Champ : France, unités légales des services marchands.
Source : Insee, Indice de chiffre d’affaires dans les services.
Toutes proportions gardées, le secteur a moins souffert de la première vague épidémique ((– 40 % en mai par rapport à janvier). que la restauration commerciale (– 74 % en mai, après – 90 % en avril). En effet, la restauration collective n’a pas été soumise à une mesure d’ordre administratif (interdictions ou restrictions d’accueil du public), contraignant les restaurants encore actifs à une activité de traiteurs jusqu’à début juin 2020. Elle a néanmoins subi une chute très marquée de fréquentation, du fait de la fermeture des établissements d’enseignement, de la suspension d’activité de nombreuses entreprises et du développement du télétravail. Seul le segment de la santé a été épargné, notamment celui des Ehpad.
Le marché de la restauration aérienne très touchée
La reprise de l’activité, après le premier confinement, n’a pas été aussi marquée dans la restauration collective que dans la restauration commerciale, qui a bénéficié à plein de la détente estivale (– 32 % contre – 7 % en août par rapport à janvier 2020). Les restaurants d’entreprises ont continué à être affectés par le maintien du télétravail, les règles de distanciation qui limitent le nombre de convives présents simultanément à table et les craintes de contamination. De nombreux salariés présents sur site apportent ou se font livrer leurs repas. Le marché de la restauration aérienne reste également très touché, du fait de l’effondrement du trafic aérien.
La réouverture du marché scolaire en septembre n’a pas suffi à relancer l’ensemble de l’activité, le segment « entreprises » demeurant à la traîne. Le deuxième confinement (novembre 2020) n’a eu qu’un impact restreint sur l’activité de la restauration collective, contrairement à la restauration commerciale.
Un taux de marge qui a baissé de moitié entre 2010 et 2018
Lecture : en 2018, le taux de marge atteint 7,2 % dans la restauration collective concédée. Champ : France, unités légales des services marchands.
Source : Insee, Ésane (données individuelles) pour les tables et leurs légendes.
Le taux de marge de la restauration collective concédée passe de 13 % en 2010 à 7 % en 2018. Ce recul est très sensible en 2012 (– 3 points), année marquée par une stagnation générale de l’activité. Mais aussi en 2018 (– 2 points), dans un contexte économique nettement plus favorable. En effet, la masse salariale augmente (+ 3,2 % par an) plus vite que la valeur ajoutée (+ 2,2 %), en raison des fortes pressions sur les prix de la restauration collective. Dans la restauration commerciale, le taux de marge diminue autant sur la période (– 6 points). Mais celui-ci était nettement plus élevé (23 % en 2010), l’activité ayant notamment bénéficié à partir de 2009 d’une baisse marquée du taux de TVA.
En revanche, bien qu’en très forte baisse, le taux de rentabilité économique des acteurs de la Collective Concédée reste élevé (16 %) comparé à celui de la RHD dans son ensemble (12 %) ou des services marchands (8 %). Il s’explique par la disponibilité d’une trésorerie abondante, liée au mode de règlement (paiement des fournisseurs à terme, mais perception immédiate ou rapide du prix des repas) et permettant de dégager un besoin en fonds de roulement négatif.
Entre 2010 et 2019, la production n’a augmenté que de 5,6 % dans ce secteur
Note : données corrigées des variations saisonnières et des jours ouvrables.
Lecture : en 2016, la production a augmenté de 4,2 % en volume dans la restauration commerciale.
Champ : France, unités légales des services marchands. Source : Insee, indice de production dans les services.