Les résultats 2016 d’AccorHotels n’entreront pas dans les annales du groupe. La progression certes indéniable de son chiffre d’affaires et de ses bénéfices (voir les chiffres ci-dessous) a été malgré tout bridée par la France. Le recul des ventes et du résultat d’exploitation de son premier marché ( 28 % de son CA total et 19,9 % de son RBE) a amoindri ses performances d’ensemble, beaucoup plus dynamiques dans les autres régions du monde. La Bourse ne s’y est pas trompée, qui a sanctionné le titre le 22 février, jour de la publication annuelle des résultats, l’action reculant de 2,40 % à 37,695 euros.
Plus marquantes resteront cette succession de décisions prises au cours des douze derniers mois. Au fil des cessions et des acquisitions annoncées, AccorHotels a bel et bien engagé la transformation de son modèle. La précédente, encore récente, remontait à 2010 avec la vente des titres de services prépayés, l’un de ses deux métiers historiques, et le recentrage sur l’hôtellerie. D’où la modification en 2015 du nom d’Accor en AccorHotels. Une dénomination qui ne ne reflète plus l’évolution présente du groupe. Ce modèle fut d’ailleurs réajusté dès 2013 par son nouveau PDG Sébastien Bazin, avec le constitution de deux pôles, HotelInvest (propriété et investissement) et HotelServices (opérateur et franchiseur).
Ce dogme du tout hôtelier a d’ors et déjà vécu. D’une part, comme Sébastien Bazin l’avait certainement envisagé dès sa nomination et la création d’HotelInvest, le groupe va définitivement céder les murs de ses hôtels. Mais il continuera de les gérer pour le compte des actionnaires de la future foncière (AccorInvest). Ce qui procurera à AccorHotels dès cette année une montagne de cash (autour de 4,6 milliards d’euros s’il devait céder 70 % d’HotelInvest valorisé à 6,6 milliards d’euros) qui sera employé à développer son réseau mondial (le groupe reste aujourd’hui surtout concentré sur l’Europe) et poursuivre les acquisitions.
D’autre part, le groupe ne se contentera plus de gérer et de franchiser ses hôtels. Il va également gérer et distribuer des hébergements touristiques aussi bien collectifs (hôtels, auberges de jeunesse, résidences…) que privés (villas, appartements, maisons de ses maîtres…) et indépendants voire concurrents de ses propres marques. Sébastien Bazin, « agile » et opportuniste, a compris début 2015 qu’il devait prendre en marche le train des plate-formes, quitte à racheter des rames entières, sous peine de voir passer sous ses yeux un gros gisement de croissance et de sérieux concurrents pour ses hôtels.
Ces décisions stratégiques semblent dessiner trois grands pôles dans le nouveau périmètre d’AccorHotels. Un développement du portefeuille de marques hôtelières et du parc mondial d’hôtels avec le rachat de FRHI (Fairmont, Raffle et Swisshotel) et la prise de participation dans 25 hours et Banyan Tree. La constitution en parallèle d’un pôle de plate-formes de location de résidences privées haut de gamme grâce aux rachats de Squarebreak, Oasis Collections, Onefinestay et Travel Keys (soit un catalogue de 9 300 résidences). Et enfin, la formalisation de services hôteliers et extra-hôteliers proposés aux voyageurs et aux entreprises, en commençant par ceux de conciergerie de John Paul. Services qui restent à expliciter et généraliser, une fois les premières phases de test analysées.
Un bon semestre sera nécessaire encore à AccorHotels pour parfaitement conceptualiser ce modèle et passer à son exécution. Sébastien Bazin, selon Les Echos, devrait annoncer le plan stratégique d’AccorHotels au cours du deuxième semestre 2017.
Deux autres gros dossiers l’attendent. Il lui faudra réussir la vente d’HotelInvest à des investisseurs de premier rang avec une valorisation optimale (sa valeur d’actifs brute se montait 6,6 milliards d’euros fin 2016). Assureurs, institutionnels et fonds souverains : une douzaine serait en lice. Il devra également stabiliser l’actionnariat d’AccorHotels en mettant le groupe à l’abri d’une OPA. Le capital est aujourd’hui éclaté entre le public (environ 61 %) l’ambitieux hôtelier chinois Jin Jiang (1er actionnaire avec 12,6 % du capital, le groupe de Shangaï, qui possède déjà Louvre Hotels, jure ne pas vouloir prendre le contrôle), les deux fonds souverains du Quatar (10,4 %) et de l’Arabie Saoudite (5,7 %) et Eurazeo (4,28 %), seule société française comptant à son capital.
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