Côté villes, France Urbaine, structure de lobbying des métropoles et des communautés d'agglomération, milite pour une réduction du plafond annuel de 120 jours de location pour les résidences principales. Mais la conférence citoyenne organisée par la Ville de Paris y est hostile. Côté campagnes, l'Association des Maires Ruraux de France signe un nouveau partenariat d'actions avec la plate-forme pour lancer en ligne 15 000 hébergements touristiques "de qualité".
Airbnb des villes, Airbnb des champs… L’un qui s’inquiète de son éviction des villes. L’autre qui se réjouit de ses perspectives de conquête du milieu rural.
La plateforme, ainsi, se félicite du nouveau partenariat signé avec l’Association des maires ruraux de France (après, en 2019, un premier test ensemble encourageant). L’AMRF regroupe près de 10 000 maires de communes de moins de 3 500 habitants. L’Américaine et la Française ambitionnent de créer pas moins de 15 000 nouveaux hébergement touristiques dans les campagnes françaises d’ici 2021. Pour atteindre l’objectif, elles comptent actionner trois leviers.
En premier lieu, les partenaires créent un fonds « Campagnes d’Avenir ». Abondé par Airbnb à hauteur de 100 euros par nouvelle annonce créée dans les communes rurales et piloté par les maires, ce fonds, d’un montant plafond de 1,5 millions d’euros (15 000 x 100 euros), financera des projets d’impacts et des programmes de formation touristique destinés aux communes.
Ensuite, Airbnb va mettre à contribution ses clubs hôtes. Une centaine de ses membres se rendront sur les marchés en plein air de de leur région pour sensibiliser les habitants aux avantages sonnant et trébuchant d’Airbnb. Enfin, l’AMRF et Airbnb lancent le Rural Bootcamp, un programme de formation en ligne pour aider les hôtes et les futurs hôtes à proposer une offre d’hébergement de qualité.
Convergences techniques avec France Urbaine…
Les relations sont plus tendues avec France Urbaine. Mais elles existent ! L’association, qui regroupe 50 grandes villes et une trentaine de communautés urbaines et d’agglomération, a pris langue début avril avec Airbnb. Les deux parties convergent au moins sur la nécessité de fiabiliser et harmoniser les numéros d’enregistrement des meublés. Cette unification permettrait de faciliter le contrôle des communes. Et de simplifier également les déclarations des plateformes locatives.
Elles s’accordent également pour souhaiter une unification des informations transmises aux collectivités. Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. Un flux porte spécifiquement sur les états déclaratifs liées au reversement de la taxe de séjour. Un autre flux concerne la nature du logement (résidence principale ou secondaire) et le nombre de jours pendant lesquels il a été louée sur l’année civile. Airbnb et France Urbaine convergent pour un élargissement du portail informatique « API meublés » développé par la DGE (Direction Générale des Entreprises). Ils souhaitent que le portail, focalisé jusqu’à maintenant sur les données de location des logements, intègre aussi celles relatives à la taxe de séjour.
… Mais divergences sur le fond
Mais les désaccords sont assez nombreux entre les deux parties. Sur la décorrélation de l’institution du numéro d’enregistrement et de la procédure de changement d’usage. Sur l’obligation systématique de renseignement des numéros d’enregistrement par les hébergeurs. Elle est de fait déjà en vigueur dans neuf villes de plus de 200 000 habitants. Ou encore sur le passage d’une fréquence annuelle à une fréquence pluri annuelle de versement des données sur l’API « meublés ». Autant de nouveaux renforcement des contrôles auxquels Airbnb est hostile.
La plus grosse pierre d’achoppement porte sur plafond annuel de 120 jours de location pour les résidences principales. France Urbaine milite pour qu’une nouvelle loi autorise les communes à moduler à la baisse ce plafond. Elle devra convaincre le Gouvernement et la majorité parlementaire, fermement opposés à cette mesure jusqu’à maintenant, au nom de la défense du pouvoir d’achat.
On sait qu’à Paris, par exemple, Anne Hidalgo veut baisser le plafond à 30 jours par an. Pas certain que les Parisiens approuvent une mesure aussi attentatoire au libre usage de leur logement principal. D’ors et déjà, la « conférence citoyenne» sur les meublés de tourisme, organisée par la maire de Paris, s’y oppose. Elle ne veut pas que la Ville touche à la limite actuelle de 120 jours cumulés par année.
En revanche, la conférence est favorable à une régulation plus ferme des meublés de tourisme, de manière à limiter leur nombre et les pratiques abusives. Mais elle recommande aussi de développer des offres alternatives à ces meublés. Auberges de jeunesse, appart’hôtels, résidences universitaires… Paris est en retard d’hébergements collectifs accessibles au plus grand nombre. Elle l’était déjà bien avant l’arrivée d’Airbnb !
Michel Fournier, président de l’association des maires ruraux de France (AMRF)
« Nous sommes ravis de lancer ce nouveau programme conjoint avec Airbnb qui, nous en sommes convaincus, contribuera à créer de nouvelles opportunités économiques sur le long terme pour nos villages.
Avec la création du fonds « Campagnes d’Avenir », un nouveau cercle vertueux nous permettra d’accueillir davantage de touristes en développant la capacité d’hébergement de nos communes. Et il nous donnera plus de moyens pour construire notre vision de long terme d’un tourisme rural de qualité qui profite au plus grand nombre. »
Emmanuel Marill, directeur d’Airbnb en Europe
« Chez Airbnb, nous avons pris conscience depuis longtemps de l’énorme potentiel touristique de la France rurale. C’est pourquoi nous travaillons depuis plusieurs années avec l’association des maires ruraux et d’ autres partenaires locaux pour soutenir son développement dans les campagnes françaises au bénéfice des hôtes et de leurs territoires.
La pandémie n’a fait qu’amplifier l’attrait touristique de la France rurale. Nous pensons que ce vaste programme conjoint avec l’AMRF contribuera à développer un modèle économique de long terme pour les territoires ruraux et leurs habitants. A mieux disperser les séjours au-delà des grandes villes. Et ainsi donner un horizon plus durable à l’économie du tourisme en France ».