Le paysage devient plus net. L’Etat, appliquant les nouvelles lois sur le dialogue social adoptées en 2014 et 2016, s’est donné les moyens de faire une mise au point, au sens photographique du terme.
Après des décennies de flou artistique durant lesquelles nombre de syndicats revendiquaient des effectifs invérifiables et souvent gonflés pour les besoins de leur cause, l’audience réelle de ces organismes dans les entreprises et auprès des salariés est enfin quantifiée et vérifiée, et sera actualisée tous les quatre ans.
Le ministère du Travail vient en effet de rendre public les résultats des mesures d’audience des syndicats de salariés et des organisations professionnelles d’employeurs (« OP »). Mesures basées, pour les syndicats, sur les résultats des élections professionnelles, et pour les OP, sur le recensement certifié par des commissaires aux comptes des entreprises adhérant et cotisant en leur sein.
Parmi les scores de centaines de branches professionnelles, HR-infos a extrait ceux de l’Hébergement Restauration. Pour qui gardait en mémoire les chiffres précédemment avancés, les chiffres 2017 pourront parfois faire sourire, sans pour autant vraiment surprendre. Coté organisations professionnelles, par exemple, les leaders d’hier le sont toujours aujourd’hui.
C’est le cas de l’UMIH, du Snarr et du SNRC. Si la plupart de ces organisations avaient déjà pignon sur rue, un nouveau sigle a néanmoins fait son apparition dans le secteur des HCR, celui du GNI (Groupement National des Indépendants), officiellement créé en 2014. A l’instar de son concurrent UMIH, le GNI figurera désormais en lieu et place des syndicats historiques qu’il fédère désormais (Synhorcat et Fagiht au premier chef).
A contrario, et ce fait est très positif, le taux de syndicalisation dans la branche est singulièrement plus élevé que de précédentes estimations sondagières. Selon l’Umih, qui se base sur des données Insee, ce taux atteindrait aujourd’hui 26 % (22 % selon le calcul HR-infos). Un score remarquable quand on sait que le moyenne nationale se situe autour de 13 % et que la branche est composée majoritairement de TPE (moins de 11 salariés). On notera au passage que la taille moyenne d’une entreprise adhérent à l’Umih est de 6,1 salariés, elle est de 12 salariés au GNI et de 43 au GNC (Groupement National des Chaînes).
Côté syndicats de salariés, les taux de participations aux élections professionnelles offrent un bon indicateur de l’audience, bien qu’il ne soit pas le seul (les adhérents cotisants compteront aussi). Même si ces taux sont beaucoup plus disparates (de 8 % dans l’hôtellerie de plein air à 59,6 % dans le thermalisme), ils semblent dynamiques, compte tenu là aussi de la sur proportion de Très Petites Entreprises, dans lesquels les syndicats sont généralement absents.
Trois centrales syndicales agrègent le plus grand nombres de votants : FO (en tête dans quatre secteurs), CGT (numéro 1 dans trois secteurs) et CFDT, la CFTC arrivant juste après, avec des scores supérieurs au seuil des 8 % (retenu pour la représentativité) dans 4 secteurs sur 7. Quant à la CFE-CGC, elle reste en tête dans le collège cadres.
Ces mesures d’audience constituent une étape clef pour apprécier « la représentativité » de ces partenaires sociaux, qui seront amenés, s’ils sont jugés « représentatifs » à négocier au niveau des branches professionnelles et interprofessionnelles, les grilles de minima sociaux, le temps de travail, la formation, et plus largement, tous les points relevant de leur convention collective.
Il reste quelques mois à l’Etat pour boucler l’instruction des dossiers en vérifiant les autres critères requis : respect des valeurs républicaines, ancienneté de deux ans au moins, indépendance, transparence financière, influence (activité et expérience), implantation territoriale équilibrée, effectif d’adhérents et cotisations, et, pour les syndicats, audience auprès des salariés.
Les arrêtés de représentativité devraient être publiés progressivement d’ici fin 2017, d’abord à l’échelle interprofessionnelle, puis au niveau des branches. En espérant que la démocratie sociale en sorte renforcée.
Le dialogue social dans les entreprises et les branches professionnelles, et donc le progrès social, passent à la fois, c’est notre conviction, par une forte syndicalisation des employeurs et des salariés, et par un pluralisme syndical.
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