Le cas Booking.com est encore loin d'être réglé

La libre concurrence commerciale entre canaux de distribution directe et indirecte est encore loin d’être acquise pour les hôteliers français, en dépit de quelques signes d’une évolution favorable.

Le bilan d’étape que vient de publier l’Autorité de la Concurrence sur les engagements pris en 2015 par le leader de la distribution en ligne Booking.com est en effet mitigé et de surcroît limité dans son analyse par deux séries d’évènements exceptionnels : les attentats d’une part, dont on sait les effets dépressifs sur la fréquentation touristique en 2015 et 2016, et l’entrée en application de la loi Macron d’autre part, celle-ci interdisant désormais toute forme de clause de parité tarifaire entre les hôteliers et les plateformes de réservation en ligne.

Prudente dans ses conclusions, l’Autorité indique certes « qu’un plus grand nombre d’hôteliers font désormais varier leur prix selon les plateformes de réservations hôtelière en ligne ». Pratiques qui étaient auparavant interdites par les clauses de parité tarifaire. Ce constat empirique témoigne selon les Sages de la rue de l’Echelle « d’une première évolution dans le secteur ».

Mais l’Autorité d’ajouter aussitôt qu’il n’y a pas de signe visible d’un développement de la concurrence entre OTA, en fonction d’autres critères plus qualitatifs ou quantitatifs : parts de marché, qualité de l’offre, évolution des taux de commission.

L’Autorité française va donc poursuivre ses travaux et n’hésitera pas, assure-t-elle, à « s’autosaisir si l’évolution concurrentielle le nécessite ». Par ailleurs, elle rappelle les initiatives européennes en cours.

En effet, sous l’égide de la Commission européenne, l’Autorité de la concurrence française et neuf autres autorités nationales évaluent actuellement les effets des solutions mises en place dans les pays européens concernant la réservation hôtelière en ligne.

Ce groupe de travail a adressé des questionnaires aux différents acteurs du secteur, hôteliers, plateformes de réservation en ligne, « métamoteurs de recherche », etc., selon une méthodologie unifiée permettant une comparaison de ces solutions.

Les conclusions de ce groupe de travail sont attendues dans le courant du premier trimestre 2017. Elles orienteront les décisions à venir des Autorités de la concurrence.

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La libre concurrence commerciale entre canaux de distribution directe et indirecte est encore loin d'être acquise pour les hôteliers français, en dépit de quelques signes d'une évolution favorable.

Le bilan d'étape que vient de publier l'Autorité de la Concurrence sur les engagements pris en 2015 par le leader de la distribution en ligne Booking.com est en effet mitigé et de surcroît limité dans son analyse par deux séries d'évènements exceptionnels : les attentats d'une part, dont on sait les effets dépressifs sur la fréquentation touristique en 2015 et 2016, et l'entrée en application de la loi Macron d'autre part, celle-ci interdisant désormais toute forme de clause de parité tarifaire entre les hôteliers et les plateformes de réservation en ligne.

Prudente dans ses conclusions, l'Autorité indique certes "qu'un plus grand nombre d'hôteliers font désormais varier leur prix selon les plateformes de réservations hôtelière en ligne". Pratiques qui étaient auparavant interdites par les clauses de parité tarifaire. Ce constat empirique témoigne selon les Sages de la rue de l'Echelle "d'une première évolution dans le secteur".

Mais l'Autorité d'ajouter aussitôt qu'il n'y a pas de signe visible d'un développement de la concurrence entre OTA, en fonction d'autres critères plus qualitatifs ou quantitatifs : parts de marché, qualité de l'offre, évolution des taux de commission.

L'Autorité française va donc poursuivre ses travaux et n'hésitera pas, assure-t-elle, à "s'autosaisir si l'évolution concurrentielle le nécessite". Par ailleurs, elle rappelle les initiatives européennes en cours.

En effet, sous l'égide de la Commission européenne, l'Autorité de la concurrence française et neuf autres autorités nationales évaluent actuellement les effets des solutions mises en place dans les pays européens concernant la réservation hôtelière en ligne.

Ce groupe de travail a adressé des questionnaires aux différents acteurs du secteur, hôteliers, plateformes de réservation en ligne, « métamoteurs de recherche », etc., selon une méthodologie unifiée permettant une comparaison de ces solutions.

Les conclusions de ce groupe de travail sont attendues dans le courant du premier trimestre 2017. Elles orienteront les décisions à venir des Autorités de la concurrence. "

Note de la rédaction
Fidéle à notre approche, nous mettons en ligne l’intégralité du bilan d’étape effectué par l’Autorité de la concurrence. Il révèle les difficultés rencontrées par ses experts pour apprécier objectivement l’impact des engagements de Booking.
bilan_engagements_booking_final_9fev17

Réactions des syndicats qui avaient saisi l’Autorité de la concurrence

(extraits de leurs communiqués respectifs)
Union des Métiers de l’Industrie Hôtelière (Umih) et Groupement National des Chaînes (GNC)
« L’UMIH et le GNC saluent l’annonce de l’Autorité de la concurrence de s’autosaisir si l’évolution concurrentielle du marché le nécessite et au vu des nouvelles pratiques anticoncurrentielles de Booking.com.
L’UMIH et le GNC continueront de plaider en ce sens d’autant que Booking.com et les OTA persistent à appliquer des clauses anticoncurrentielles, notamment les clauses de parité tarifaire restreinte (« Hotels preferred »), pourtant interdites par la loi Macron et le Tribunal de commerce de Paris, et qui trompent le consommateur.
L’UMIH et le GNC prennent acte de la communication de l’Autorité de la concurrence  confirmant la position des hôteliers : les engagements pris par Booking.com n’ont pas clairement produit les effets escomptés 
On ne constate aucun renforcement de la concurrence entre OTA. Au contraire, Booking.com a encore accru sa part de marché sur le marché de la réservation en ligne depuis l’entrée en vigueur des engagements (juillet 2015) (NDLR : la part de marché de Booking.com aurait augmenté entre 2015 et 2016 et se situerait désormais entre 60 et 70%)
Par ailleurs, aucune baisse des commissions n’a été constatée depuis les engagements de Booking.com. Selon l’UMIH et le GNC, en 2016, près de 500 millions d’euros ont été reversés par les hôteliers aux OTA et notamment à Booking.com ; montant totalement disproportionné par rapport aux services rendus aux hôtels et aux clients.
L’Autorité de la concurrence reconnaît que Booking.com n’a pas été en mesure de démontrer la réalité du risque de parasitisme pourtant mis en avant pour justifier le maintien de la clause de parité tarifaire et empêcher les hôteliers de proposer aux consommateurs des prix moins chers sur leurs propres sites par rapport au site de Booking.com.
Pour Roland Heguy président confédéral de l’UMIH, « la version Booking.com 2017 est bien différente de la version 2013, à l’origine de la saisine de l’Autorité, mais continue d’être anticoncurrentielle. Se donnant l’opportunité de s’autosaisir, l’Autorité reconnaît ainsi qu’il est nécessaire de ne pas baisser la garde et de surveiller les pratiques anticoncurrentielles de Booking.com qui ne cessent d’évoluer au-delà des clauses de parité dont on sait qu’elles sont illégales. Notre vigilance demeure et nous ne manquerons d’alerter l’Autorité et de réagir fermement aussi longtemps que les OTA continueront de bafouer leur engagement auprès de l’Autorité de la concurrence et la loi Macron au détriment des consommateurs clients de nos établissements. »
L’UMIH et le GNC poursuivent leurs actions pour demander un plafonnement du taux de commission, faire respecter l’interdiction des clauses de parité restreinte qui sont illégales, supprimer l’exigence de disponibilité à tout moment, clarifier le fonctionnement de l’algorithme en apportant loyauté, clarté et transparence tant aux hôteliers qu’aux consommateurs sur le classement des hôtel et supprimer l’utilisation abusive de l’icône de la « Garantie du meilleur tarif »
Groupement National des Indépendants (GNI)
« Malgré les arguments forts portés devant elle par le GNI lors d’une audience en décembre dernier, l’Autorité n’a pas pu se prononcer sur les engagements pris par la plateforme américaine au printemps 2015, suite à la saisine effectuée par les organisations professionnelles, dont le GNI.
Sont invoqués à l’appui de ce statu quo : le vote de la loi Macron, qui a changé la donne, mais aussi le contexte lié aux attentats de 2015, qui a considérablement affecté l’analyse statistique.
Néanmoins, l’Autorité de la Concurrence s’est montré peu convaincue par les arguments présentés par Booking.com, et signale qu’elle « restera particulièrement vigilante » sur les pratiques des agences de voyage en ligne (« OTAs »).
Elle indique également qu’elle n’hésitera pas à s’autosaisir en cas de détérioration de la situation concurrentielle, en particulier en ce qui concerne le devoir de transparence et de loyauté depuis peu imposé aux plateformes par la Loi pour une République Numérique.
L’Autorité annonce enfin être dans l’attente de conclusions sur les travaux actuellement menés par ses homologues européens, avant de lancer des analyses plus approfondies, dans le futur, sur la question.
Si le GNI regrette l’absence de mesures coercitives à l’encontre des pratiques, pourtant assurément anticoncurrentielles, des plateformes, notamment en ce qui concerne le cryptage des e-mails la parité dans les contrats « preferred » et les modalités de classement des établissements, il reste cependant vrai que les clauses de parité tarifaire, principale pratique anticoncurrentielle dénoncée depuis des années, avaient été interdites postérieurement aux engagements de Booking.com, à l’été 2015, grâce à l’action forte du GNI lors de la rédaction de la loi Macron.
Le GNI demeure néanmoins confiant dans la vigilance de l’Autorité de la Concurrence dans les mois qui viennent, et n’hésitera pas à lui signaler, ainsi qu’aux services administratifs compétents, toute dégradation des relations entre OTAs et hôteliers, ainsi que toute détérioration illégitime des conditions de marché au détriment de ces derniers.»

Rappel des engagements pris par Booking.com en avril 2015
  • Dans le cadre d’une procédure ouverte devant l’Autorité de la concurrence par les principaux syndicats hôteliers français et le groupe Accor, Booking.com prend l’engagement de modifier ses pratiques commerciales.
  • Booking.com s’engage en effet à modifier la clause de parité tarifaire et à supprimer toute clause imposant des obligations de parité en termes de disponibilités de chambres  ou de conditions commerciales non seulement à l’égard des plateformes concurrentes mais également des canaux directs hors ligne des hôtels et d’une partie de leurs canaux en ligne.
  • Les hôtels pourront ainsi librement pratiquer des tarifs inférieurs et/ou des conditions commerciales meilleurs sur des plateformes concurrentes de Booking.com et leur allouer des quotas de nuitées plus importants.
  • Ils pourront également, notamment, proposer des tarifs inférieurs à ceux affichés sur le site de Booking.com sur leur canal de vente hors ligne (réservation sur place, par téléphone, fax, mails, messageries instantanées, points de vente physiques des agences de voyage, etc.), sous réserve que ces tarifs ne soient pas publiés sur le site internet de l’hôtel. Ils pourront ainsi proposer des tarifs inférieurs à ceux affichés sur le site de Booking.com aux clients bénéficiant de programmes de fidélité.
  • Les hôtels pourront encore réserver à leur canal direct de vente (en ligne ou hors ligne) un nombre de nuitées supérieures au nombre de nuitées allouées à Booking.com »

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