Sylvia Pinel dessine l'après-contrat d'avenir

La ministre s’est montrée très critique sur la conception du contrat d’avenir par le précédent gouvernement mais a jugé son impact positif pour l’emploi et le dialogue social.
Madame Pinel attend de la profession qu’elle se mobilise également sur la formation, les investissements de modernisation et la qualité.

La Ministre de l’Artisanat, du Commerce et du Tourisme a annoncé le 23 novembre sa feuille de route pour la filière restauration sur la durée du quinquennat. Sylvia Pinel tourne définitivement la page du contrat d’avenir. Elle insiste sur quelques grands thèmes prioritaires : concertation, formation, qualité, TVA à 10%, contreparties au crédit d’impôt compétitivité et au contrat de génération… Avec la hausse de la TVA en janvier 2014, les syndicats patronaux espèrent, eux, que les compensations financières du gouvernement seront à la hauteur de leurs espérances. HR-infos assistait à la conférence de presse de la ministre. Compte rendu et analyse.

SOCIAL, FORMATION, EMPLOI, QUALITÉ, GOUVERNANCE…
PRIORITÉS PINEL

D’après extraits du dossier de presse

«1 – Poursuivre le dialogue social pour améliorer les conditions des salariés et lutter contre le travail illégal»

– «Le dialogue social doit se poursuivre» et devenir la norme, avec l’objectif de garantir des revenus suffisants aux salariés et de lutter contre le travail illégal. En jeu, l’attractivité du secteur.

«2 – Améliorer la formation pour répondre aux difficultés de recrutement dans les métiers de la restauration et poursuivre les efforts en matière d’emploi»

– «Chantier essentiel», le développement d’une formation de qualité, exemplaire, efficace nécessitera la création de places supplémentaires dans les CFA et les lycées professionnels.
– Bénéficiaires du crédit d’impôt compétitivité et des contrats de génération, les entreprises devront poursuivre leurs efforts en matière de création d’emploi.

«3 – Renforcer la qualité dans les établissements»

Dans le sillage du rapport de Thomas Thévenoud, la ministre souhaite la mise en place d’un plan qualité dans la restauration, qui s’appuiera en particulier sur la promotion de la marque France, davantage de transparence vis à vis des consommateurs, l’exigence d’hygiène et de sécurité des locaux, l’amélioration et la modernisation du cadre et des outils de travail, et la valorisation des arts de la table.
– Sylvia Pinel annonce un développement du titre de maître-restaurateur, qui passera d’ici l’été 2013 par une rénovation et une simplification de son référentiel.

«4 – Mettre en place une nouvelle gouvernance»

Un comité stratégique sera installé, à vocation de comité de filière, associant toutes les parties prenantes : fournisseurs, artisans des arts de la table, syndicats de salariés, représentants des consommateurs, des parlementaires et des élus locaux.
– Ce comité travaillera avec les organisations professionnelles à la mise en oeuvre du Pacte national pour la croissance, la compétitivité et aux objectifs fixés pour la filière.


Ce n’est que notre analyse (mais on la partage !)

Du neuf avec du neuf et de l’ancien


S’agissant de TVA, les bilans se suivent et ne se ressemblent pas.
Après le verre aux trois quarts vide qui symbolisait l’impact du contrat d’avenir vu par le rapport Thévenoud, voici le verre à moitié plein ressortant du bilan établi par Sylvia Pinel en concertation avec les organisations professionnelles. Un écart d’appréciation s’expliquant par ce co-traitement Etat-Patronat et par la différence de grille et de périmètre d’audit chez Thomas Thévenoud. Le député PS considérait les trois années du contrat d’avenir 1, quand Bercy et la profession se concentrent sur ses 24 premiers mois.
On ne se lancera pas ici dans l’examen de ce bilan officiel, sérieux et le plus souvent étayé. Regrettons tout de même que l’Etat n’ait pas poussé plus loin son analyse sur les créations d’emplois salariés et qu’il n’ait rien révélé de l’évolution des recettes fiscales et sociales avant et après le changement de taux.
C’est manifeste, Sylvia Pinel a voulu calmer le jeu, sans pour autant se priver de critiquer un contrat jugé mal né. Extraits de son discours et du dossier fourni à la presse : « Echec de la logique de contractualisation imaginée par le précédent gouvernement », « Dispositif flou, manquant de cohérence et d’objectifs temporels clairs », « Il est temps de sortir du contrat d’avenir qui n’a pas porté ses fruits ».
Avec habileté, la ministre a donc pris soin de dissocier les erreurs de ses prédécesseurs des efforts tangibles des professionnels dans au moins deux domaines, l’emploi et le dialogue social.
Exit donc le contrat d’avenir. Place à … On ne sait pas trop encore. Certaines priorités de Sylvia Pinel consistent à relancer ce qui a échoué dans le contrat Novelli-Sarkozy : le développement de la formation en alternance et les investissements de modernisation.
Toutefois, deux thèmes plus neufs (encore que !) apparaissent : le lancement d’un plan qualité (idée de Thévenoud), en lien avec la marque France; et l’installation d’un comité stratégique de filière, dont on ignore encore les missions et le fonctionnement.
Madame Pinel aura, elle aussi, avec le crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE) et le contrat de génération, une enveloppe fiscale et sociale à distribuer à la branche et à gérer avec elle.
La ministre, à son tour, devra se montrer bonne comptable du milliard d’euros (selon nos premières estimations) dont pourrait bénéficier l’Hébergement Restauration au titre du CICE. Un milliard à réinvestir entièrement cette fois dans les entreprises, en emploi et en investissement, selon des modalités que le gouvernement va préciser dans les semaines qui viennent.
TVA contre contrat hier, CICE contre quoi demain ? Les contreparties ne seront sans doute plus facultatives. Cela nous ramène huit ans en arrière … Quand la prime dite Sarkozy (jusqu’à 114,40 ? par mois par salarié), était conditionnée au versement d’une rémunération (Smic hors avantage en nature).
Mais en 2004, le taux de TVA était encore au taux 19,6 % et cette prime sectorielle à caractère temporaire, jusqu’à l’arrivée du taux réduit de 5,5 % en 2009, passé à 7 % en 2012, avant de devenir un taux intermédiaire à 10 % en 2014… Bref, la TVA plus que jamais variable d’ajustement de politique économique dans un pays en crise.
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Réalisation : Solenne Le Hen
Interviews et analyse : Jean-François Vuillerme


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