Le "Fait maison" fera-t-il recettes ?

Lancée à la mi-juillet par un décret ministériel, la mention « Fait maison » émerge encore très timidement sur les cartes et les vitrines des restaurants, comme le révèlent notre enquête et d’autres sources professionnelles et syndicales. Timidement certes mais réellement, notre rédaction a pu le constater en interrogeant quelques restaurateurs « pionniers » de la mention « Fait maison ».

La sortie en plein été des textes officiels n’a pas facilité le démarrage du « Fait maison ». Mais il existe aussi d’autres freins, sans doute plus durables.
Certains restaurateurs ne veulent pas de cette mention qu’ils jugent trop libérale en autorisant l’utilisation dans les plats « Fait maison » de produits bruts déjà transformés. Et surtout, beaucoup d’autres semblent redouter les effets pernicieux d’une juxtaposition sur leur carte de plats « Fait maison » accompagnés du logo idoine, et de plats sans logo, qui seront considérés, à juste titre, comme des plats industriels par les consommateurs. Enfin, sans une forte implication des représentations syndicales et professionnelles pour l’expliquer et la recommander, la mention risque de demeurer accessoire, quand bien même celle-ci est obligatoire, que l’on élabore ou que l’on élabore pas des plats faits maison.

Un premier point de la situation par notre rédaction, et le témoignage de Carole Delga, la Secrétaire d’Etat qui porte et soutient le dossier. Et l’avis d’HR-infos : oui, il faut tabler sur le « Fait maison », quand on y répond, et inciter à l’inscrire sur les cartes. »

Lancée à la mi-juillet par un décret ministériel, la mention "Fait maison" émerge encore très timidement sur les cartes et les vitrines des restaurants, comme le révèlent notre enquête et d'autres sources professionnelles et syndicales. Timidement certes mais réellement, notre rédaction a pu le constater en interrogeant quelques restaurateurs "pionniers" de la mention "Fait maison".
La sortie en plein été des textes officiels n'a pas facilité le démarrage du "Fait maison". Mais il existe aussi d'autres freins, sans doute plus durables. Certains restaurateurs ne veulent pas de cette mention qu'ils jugent trop libérale en autorisant l'utilisation dans les plats "Fait maison" de produits bruts déjà transformés. Et surtout, beaucoup d'autres semblent redouter les effets pernicieux d'une juxtaposition sur leur carte de plats "Fait maison" accompagnés du logo idoine, et de plats sans logo, qui seront considérés, à juste titre, comme des plats industriels par les consommateurs. Enfin, sans une forte implication des représentations syndicales et professionnelles pour l'expliquer et la recommander, la mention risque de demeurer accessoire, quand bien même celle-ci est obligatoire, que l'on élabore ou que l'on élabore pas des plats faits maison.
Un premier point de la situation par notre rédaction, et le témoignage de Carole Delga, la Secrétaire d'Etat qui porte et soutient le dossier. Et l'avis d'HR-infos : oui, il faut tabler sur le "Fait maison", quand on y répond, et inciter à l'inscrire sur les cartes."
 Les commentaires de Carole Delga


Carole Delga : «La mention « Fait maison » est accessible à tous et concerne tous les restaurants, de la petite table familiale de quartier, du bistrot jusqu’au très grand restaurant : c’est la signature d’une bonne pratique, qui informe le consommateur; Elle permet de le rassurer
et de lui indiquer clairement, et en toute transparence, comment son repas a été préparé (…). Après certaines pratiques qui ont provoqué des scandales sanitaires, le « Fait maison » qui pourra concerner tout ou partie des plats proposés à la carte des restaurants, éclairera chacun
»

La mention « Fait maison » : l’essentiel sur son utilisation

-* désormais réglementée par un décret et inscrite dans la loi (loi Consommation du 17 mars 2014)
-* un décret et un guide d’utilisation définissent avec clarté les modalités de sa mise en oeuvre
-* mention officielle à indiquer :  » Les plats « faits maison » sont élaborés sur place à partir de produits crus » (et non plus bruts) .
-* elle repose donc sur deux principes : plats élaborés sur place Et à partir de produits crus
-* tous les établissements de restauration commerciale et de vente à emporter doivent indiquer cette mention officielle sur leur carte
-** la mention doit figurer y compris dans les maisons n’élaborant pas de fait maison
-** elle est symbolisée par un logo officiel placé en face des plats faits maison (entrées, plats de résistance ou desserts)
-** si toute la carte est élaborée « Fait maison », le logo officiel peut s’apposer à un endroit unique
-* Les établissements ont jusqu’au 1er janvier 2015 pour se mettre en conformité
Rappelons qu’ un plat mentionné comme fait maison doit être entièrement cuisiné-transformé à base de produits bruts. Par produit brut, le décret d’application définit un produit alimentaire « n’ayant subi aucune modification importante, y compris par chauffage, marinage, assemblage ou une combinaison de ces procédés ».
Toutefois, un produit brut peut avoir subi des modifications mécaniques et thermiques. Il peut ainsi avoir été épluché, nettoyé, taillé, puis surgelé ou conditionné sous vide.
Cette définition élargie du produit brut rompe avec les définitions en usage jusqu’à ce jour (définitions toutefois non normalisées) qui assimilait le produit brut à un produit frais, conservé quasi en l’état (voire découpé, piècé), à température ambiante ou réfrigérée. Ce point fait débat dans la profession, certains cuisiniers considérant que l’authentique fait maison ne peut que reposer sur des produits frais et saisonniers.

Indispensable : le guide d’utilisation du « Fait maison »

Dans la foulée de la publication le 13 juillet au Journal Officiel du décret d’application de la mention « fait maison », le gouvernement a mis en ligne le guide d’utilisation de la mention, qui devrait faciliter la mise en application et résoudre certaines difficultés d’interprétation. Le guide contient par ailleurs la charte graphique de son logo officiel.
Ce guide a été réalisé par le Secrétariat d’Etat chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire, en concertation avec les professionnels de la restauration.

Le décret Décret n° 2015-505 du 6 mai 2015 modifiant le décret n° 2014‑797 du 11 juillet 2014 relatif à la mention « fait maison » dans les établissements de restauration commerciale ou de vente à emporter de plats préparés

 

Le site ressources officiel du « fait maison »

(portail ministériel)

En noir ou en blanc, le logo officiel déclinable selon l’environnement graphique

Ce logo, apposable en face du plat concerné ou sur un emplacement visible de la carte si celle-ci comporte uniquement des plats fait maison, doit être accompagné de ce libellé : « Les plats « faits maison » sont élaborés sur place à partir de produits bruts.



L’apposition du logo officiel engage la responsabilité de l’établissement, il doit pouvoir justifier auprès de ses clients et des agents de la DGCCRF qu’il satisfait aux critères du « Fait maison ». Dans le cas du restaurant « L’été en pente douce », sur les flancs de la Butte Montmartre, il doit donc pouvoir démontrer que tous les plats sont « Fait Maison ».

« Le Mesturet », dans le 2 ème arrondissement de Paris, rapproche sur la vitrine le logo « Fait Maison » du logo « Maître Restaurateur » en indiquant lui aussi que les plats sont entièrement faits maison.


Ce n’est que notre avis (mais on le partage !)

Un bon support pour valoriser la vraie cuisine. Encore faut-il « inciter » à l’utiliser »?

A l’instar de la gastronomie, la mention « Fait maison » rejoint la longue cohorte des exceptions françaises, celle-ci plutôt louable d’ailleurs dans son principe »? Nulle part en Europe, voire dans le monde, on trouvera un dispositif comparable inscrit dans la loi.
Faut-il se plaindre du prix unique du livre ? Des quotas de musique française imposés aux radios ? Du reversement d’une partie (10,72 %) du prix du ticket d’entrée au cinéma pour financer notre production cinématographique ? Autant de dispositifs qui servent efficacement l’économie et la culture tricolore.
La comparaison a toutefois ses limites : le Fait maison n’a pas la capacité de relancer notre gastronomie malmenée par une conjoncture défavorable. Les restaurateurs peuvent, en tout cas, en escompter une amorce de clarification de l’offre en restauration française, extrêmement diverse aujourd’hui, face à laquelle les consommateurs se perdent parfois. Et, in fine, espérons-le, une valorisation de leur métier.
Clarification et valorisation, les clients en redemandent aussi. Car si les Français, tous les études en attestent, attachent encore de la valeur à leur restaurant, c’est qu’ils attendent toujours d’eux qu’ils donnent de la valeur à la ce qu’ils mangent.
Dans un sondage récent (commandé par l’Umih en 2013), une forte majorité de consommateurs jugent l’utilisation de plats industriels incompatibles avec l’image qu’ils se font d’un restaurant. De plus, ils se déclaraient favorables à la création d’un statut garantissant des plats cuisinés sur place. Conclusion : une bonne partie des Français, effectivement, escomptent d’un restaurant qu’il crée lui-même cette valeur ajoutée, en élaborant ses plats sur place et en offrant de la qualité dans le service.
Des plats cuisinés sur place à partir de produits bruts, c’est exactement ce que la mention Fait Maison garantit et met en valeur. Elle répond donc à des attentes et détient une légitimité, n’étant pas sortie du chapeau de Bercy mais d’une concertation poussée (trop poussée, aux yeux de certains restaurateurs) avec les organisations professionnelles.
Le diable se nichant dans les détails »?, certains professionnels et plusieurs critiques gastronomiques ont jugé en effet la définition du produit brut bien trop laxiste pour garantir une authentique fabrication sur place.
Selon eux, produit brut doit signifier avant tout produit frais. Car on ne saurait cuisiner chez soi que du frais. L’histoire de la gastronomie et de ses usages leur donne raison. Du moins jusqu’à un passé récent. Grosso modo, jusqu’aux années 70 du vingtième siècle.
Mais telle n’est plus la réalité aujourd’hui. On peut l’affirmer sans grand risque : la majorité des restaurants de France cuisinant sur place utilisent des produits, végétaux, carnés, pâtissiers »?, ayant subi des modifications mécaniques et thermiques.
Exécutent-ils pour autant une cuisine d’assemblage, incompatible avec le « Fait maison » ? Non, dès lors que ces produits ne sont pas eux-mêmes déjà entièrement cuisinés, « finis », au sens industriel du prêt à l’emploi. Le législateur, guidé par les professionnels, a admis il est vrai quelques exceptions pour la plupart inévitables. Hormis peut-être la pâte feuilletée « ?
Le Fait maison ne repose donc pas sur une logique du tout ou rien mais sur un « état de l’art » actuel. Rien n’interdit par ailleurs à un restaurant qui réalise une cuisine exclusivement de produits frais aucunement modifié auparavant et de surcroît saisonniers et locaux, de le faire savoir à ses clients et aux médias »? Sans pour autant exiger du législateur de lui concocter une législation supplémentaire sur mesure »?
Plutôt que de vouloir surenchérir à nouveau en imposant une réglementation supplémentaire plus contraignante encore, comme cette fausse bonne idée de vouloir protéger l’utilisation du terme restaurant, l’urgent pour les pouvoirs publics, Et pour les syndicats professionnels demandeurs et cop-producteurs du « Fait Maison », c’est de diffuser son mode d’emploi le plus largement et le plus rapidement possible.
Ce qui est loin d’être le cas en cet automne 2014. La majorité des restaurants éligibles pourtant aux critères du « Fait maison », n’en font pas mention sur leur carte et n’utilisent pas son identité graphique. La visibilité du « Fait maison » est clairement cette fois une responsabilité partagée, entre l’Etat et les organisations professionnelles. Un premier bilan de l’application du dispositif est prévu au printemps 2015. A chacun d’ici là d’agir !
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Enquête et interview : Solenne Le Hen
Texte et avis : Jean-François Vuillerme
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